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Lectures

Nellie Bly, Nellie Bly, Dans l'antre de la folie

de Carole Maurel

par Laurence G. - Au moulin des Lettres

Lorsque Mme Cochrane, une fois veuve et sans fortune, dut abandonner sa vie bourgeoise, sa fille aînée Elisabeth Jane, née en 1864 en Pennsylvanie, se fixa deux objectifs dans la vie : ne pas mourir de faim et rédiger des articles qui lui permettraient de vivre de sa plume tout en dénonçant le sort réservé aux femmes et au monde ouvrier (entre autres).
Signant sous le pseudonyme de Nellie Bly, Elisabeth Jane va se faire connaître bien au-delà des frontières de l’État de New York grâce à l’un de ses reportages « en immersion » dont elle a été pionnière. Un article sur l’établissement de sinistre renommée, l’hôpital psychiatrique de Blackwell, lui a été commandé par le directeur du grand quotidien le New York World ; elle va se faire passer pour malade afin d’y être recluse et rédiger ensuite une série d’articles sur la vie des femmes internées . C’est cette enquête incroyable que relate la BD.
Le découpage de la Bd alterne le récit à la première personne du passé douloureux de la jeune journaliste et le récit de son internement qui a duré 10 jours. Nellie Bly va dévoiler tout ce que ces femmes internées devaient subir : infirmières incompétentes et brutales, médecins totalement corrompus, humiliations, repas insuffisants, bains d’eau froide… On découvre avec effroi que beaucoup de ces femmes étaient enfermées par leur propre famille qui s’en débarrassaient ainsi si elles n’arrivaient pas à trouver un mari. D’autres, se réfugiant dans un asile pour les pauvres car sans ressources, finissaient aussi dans cet asile psychiatrique malgré l’absence totale de symptômes. Une fois internées, ces femmes n’avaient pratiquement aucune chance d’en sortir d’autant plus que les mauvais traitements finissaient par avoir effectivement raison de leur santé physique et psychique.
Le récit du calvaire des résidentes de Blackwell suscita énormément de réactions et permit une évolution dans le traitement des patientes.
On retrouve le trait rond et doux de Carole Maurel que j’avais déjà beaucoup apprécié dans la Bd intitulée « Collaboration horizontale » (parue chez Delcourt en 2017). Cette douceur du trait ne masque toutefois pas les tensions dramatiques du récit. Un très beau roman graphique sur une femme exceptionnelle !

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La République des faibles

de Gwenaël Bulteau

par Laurence G. - Au moulin des Lettres

Pour terreau de ce 1er roman noir, Gwenaël Bulteau a choisi la ville de Lyon en l’an 1898 et nous plonge dès les premières pages dans une enquête criminelle au cours de laquelle la police va devoir fouiller les ruelles du quartier des Canuts -sur la colline de la Croix-Rousse- afin de retrouver le meurtrier d’un garçonnet retrouvé sans tête.
A crime horrible, réponse rapide : le commissaire Soubielle est à la tête d’une brigade judiciaire qu’il vient de créer de toutes pièces pour rénover la procédure des enquêtes policières. Il sait qu’il lui faut résoudre rapidement l’affaire s’il veut que sa brigade soit pérennisée.
Si le crime est bien le moteur de ce roman, il est aussi un prétexte pour nous relater la vie sociale et intime des enquêteurs ainsi que celle des Lyonnais en cette toute fin du XIXème siècle. Le récit est passionnant et nous transporte dans les quartiers ouvriers et miséreux de la ville au moment où la France entière se passionne pour le procès d’Esterhazy à l’origine de l’affaire Dreyfus, procès suivi d’un acquittement d’Esterhazy qui déclenche l’ire de Zola et son tonitruant « J’accuse ».
Les polémiques politiques entre dreyfusards et anti-dreyfusards mais aussi entre syndicalistes et réactionnaires éclatent partout y compris au sein de la brigade de Soubielle. Bulteau décrit tout ce contexte avec beaucoup de force et de réalisme, notamment les violentes manifestations antisémites suite à la parution de l’article de Zola.
Bulteau peuple son roman de multiples personnages secondaires issus de la petite bourgeoisie et du monde ouvrier et s’attache tout particulièrement aux enfants soumis à une violence sociale et familiale terrible.
La plume de l’auteur est sûre et élégante, la langue sans anachronisme et les dialogues succulents.
Un coup d’essai et un coup de maître !

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L'ami

de Tiffany Tavernier

par Maxime G. - Librairie Larcelet

Dès les premières pages, c’est le choc.
Un couple, Thierry et Elisabeth, habite un petit pavillon dans une campagne tranquille ; des gendarmes surarmés débarquent chez leur voisins Guy et Chantal pour les arrêter : ceux-ci seraient de monstrueux tortionnaires de fillettes recherchées depuis des mois.
Comment se remettre d’une telle déflagration, lorsque l’on repense à tout ce que l’on a partagé avec ces voisins devenus « amis « , surtout quand les deux hommes avaient la même passion , l’étude des insectes….
Très vite, Thierry, personnalité taiseuse et taciturne doit faire face à ses propres souffrances , manques et non-dits dans son couple. Chacun à sa manière devra se reconstruire.
Au-delà du dégoût inspiré , de la trahison de cet ami et, du poids de l’enquête, l’auteur nous livre un bouleversant portrait sur les faiblesses humaines mais aussi sur les facultés de tout individu à renaître de l’horreur….

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Huit crimes parfaits, Roman

de Peter Swanson

par Rémi G. - Librairie La Fabrique

J'en ai un peu ras-le-bol du polar. De cette course au détective-qui-soigne-ses-tourments-intérieurs, de ces familles-dysfonctionnelles-pourtant-biens-sous-tout-rapport, de ces fortunes-bâties-sur-un-mensonge, et de ces serial-killers-aux-marottes-étranges.
En deux mots, de l'essentiel de la production polaristique.

Peter Swanson n'en a pas marre du polar, on sent qu'il adore ça, et il est contagieux.
Il propose avec Huit Crimes Parfaits un vrai bon polar. Sans chichis, sans esbrouffe, sans bain de sang. Juste une bonne histoire, astucieuse, aux personnages attachants.
Malcolm est libraire dans une boutique spécialisée en polar, où il tient un blog que personne ne lit. Il tombe un peu des nues quand l'agent Gwen Mulvey l'interroge à ce sujet : un tueur semble utiliser une de ses sélections de livres ("les huits meurtres parfaits" !) pour commettre ses crimes...

Et hop, c'est parti. Et je n'ai pas boudé mon plaisir !

Juste un bon polar, et c'est déjà beaucoup !

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Presqu'îles

de Yan Lespoux

par Lepréau-Lacourdesgrands .. - Librairie Le Préau

Quand un professeur d'Occitan nous raconte le Médoc grâce à ses souvenirs d'enfance, son talent de conteur et sa plume pleine de pudeur cela nous fait commencer l'année 2021 avec de formidables moments de lectures rythmés par ces textes courts.

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