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Lectures

Une histoire des abeilles

de Maja Lunde

par Jean-Loup Z. - Entrée Livres

3 histoires
3 époques
3 vies intimement liées
Des instantanés pour côtoyer les abeilles, apprendre la création de leur habitat, leur organisation et prendre conscience de leur importance pour la Terre et nous-mêmes.
Sujet amené subtilement, sans tomber dans le cours de science ni la moralisation.
A lire et réfléchir !

Noëlline - Libraire

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Jeu blanc

de Richard Wagamese

par Laurence G. - Au moulin des Lettres

Après « Les étoiles s'éteignent à l'aube » paru en 2016, nous sommes à nouveau transportés au Canada et c'est l'histoire des enfants Ojibwés tout autant que la sienne que va relater Saul Indian Horse, une histoire pleine de douleurs et de violence envers son peuple. Réfugié dans un centre de désintoxication, Saul se doit de raconter sa vie s'il veut reprendre le chemin sans l'aide de l'alcool. Il va prendre la plume et remonter le cours du temps.
Le récit démarre fin des années 50, en Ontario, quand Saul est encore un jeune enfant. Les temps sont toujours durs pour la communauté ojibwée qui tente de maintenir ses traditions malgré le travail de sape des blancs. Resté seul, ses parents, sa sœur et sa grand-mère disparus, l'enfant de 7 ans est placé dans un pensionnat pour jeunes Indiens comme il en existe alors des dizaines au Canada. L'auteur fait clairement allusion ici à la « rafle des années 60 » - en anglais « sixties scoop » -, terme utilisé pour désigner la politique gouvernementale qui permit d'arracher de leur famille des milliers d'enfants sous prétexte de les éduquer. Ces enfants devaient y suivre les préceptes des églises catholique et anglicane qui y oeuvraient en accord avec le gouvernement fédéral, leur but étant d'éradiquer la culture indienne en interdisant aux enfants de parler leur langue et de maintenir vivante leur culture.
Saul sera l'un des ces enfants mais son parcours va être particulier car il va découvrir le hockey sur glace, sport national pour lequel il se montre exceptionnellement doué. Il s'accroche à la pratique sportive comme à une bouée de sauvetage et c'est le hockey qui va lui permettre de sortir du pensionnat.
On retrouve ici la même puissance d'évocation que dans le livre précédent. Wagamese nous fait partager les affres de son personnage mais sait également décrire la beauté somptueuse de la nature canadienne. Il fait ressentir la violence et le racisme de la société canadienne envers les peuples autochtones mais aussi l'amitié et l'entraide que Saul va trouver parmi les siens; son histoire appartient en fait à la mémoire collective canadienne. Un roman superbe de « rédemption » et « d'espoir » comme l'a décrit l'auteur lui-même.

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Le camp des autres

de Thomas Vinau

par Laurence G. - Au moulin des Lettres

Ouvrez le livre de Thomas Vinau et vous aurez droit à une bouffée de bonheur dès les premières pages, un bonheur de lecteur exigeant comme vous l'êtes sans doute, avide de textes forts et bien tournés.
Avec ses six chapitres, courts mais denses, le gaillard vous attrape et ne vous lâche plus. Son écriture est une gigue endiablée, elle ébahit, elle enjôle, tout en poésie et petits bijoux offerts au fil des pages de ce roman qui commence dans la douleur du « givre [qui] fait gueuler la lumière » et finit par un « printemps qui pétille ».
C'est Gaspard que l'on suit quelques mois durant, en l'année 1905, un enfant encore. Il vient de recevoir une sacrée raclée, une de plus, une de trop, et s'est enfui dans la forêt portant dans les bras son chien bâtard, encore plus blessé que lui mais qu'il ne veut pas abandonner. Il ne peut trouver refuge qu'au plus profond des bois, il le sait, on ne pourra pas le débusquer, là. C'est sans compter celui qui se fait nommer Jean-le-blanc, guérisseur-ermite ; il va sauver le garçon à moitié mort de faim, de froid, de peur, de coups et ce grand solitaire va l'accepter jusqu'à vouloir même l'initier aux secrets des plantes. Dans cet abri-cocon isolé du monde, Gaspard se remet peu à peu et apprend le langage de la nature. D'autres personnages vont bientôt y débarquer l'entraînant vers de nouveaux paysages. Ils font partie d'une famille, gitans, repris de justice, prostituées et c'est l'une d'elles, Sarah, qui va le prendre sous son aile. Une autre histoire se profile, celle d'hier identique à celle d'aujourd'hui, l'histoire de ceux qui parcourent les routes, mal vus et mal aimés.
Quand on lit les lignes ajoutées en exergue aux divers chapitres, phrases tirées de Dhôtel, de Rimbaud, de Hugo, de Guillevic, on sait que Vinau fait partie, lui, de cette famille-là ; on retrouve dans ses oeuvres le même goût pour la langue, celle qui claque et celle qui poétise, qui vous estourbit par toute la beauté qu'elle contient et par les images qu'elle fait naître. Qu'il ait recours au patois ou à la langue savante, Vinau sait y faire, les mélanges sont réussis et toujours créés à bon escient. Voilà tout simplement l'un des plus beaux romans de la rentrée littéraire 2017.

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Un certain M. Piekielny

de François-Henri Désérable

par Laurence G. - Au moulin des Lettres

A la question « Mais qui est donc ce M. Piekielny ? », héros du dernier roman de François-Henry Désérable, la réponse peut être tout sauf courte. Ce personnage aux contours flous apparu dans « La promesse de l'aube » est remarquablement exhumé de l'oubli par Désérable. Après Evariste Gallois dont notre jeune et brillant auteur s'était emparé pour en livrer un portrait enlevé, on s'attend en effet à lire émanant de sa plume une nouvelle biographie alerte, un dépoussiérage documenté de la vie de cet obscur personnage lituanien (car Piekielny est de Vilnius). Habile subterfuge !
Derrière M. Piekielny on découvre en réalité, encastrées telles des poupées russes, bien d'autres silhouettes : celle de Romain Gary qui le premier lui a donné un rôle de figurant dans la littérature, celle de Désérable lui-même, celles de femmes, -mères, maîtresses- et celles des quelques milliers de Juifs de Vilnius contemporains de Piekielny.
Tout démarre grâce à un concours de circonstances qui veut que Désérable se retrouve, au cours d'un voyage, devant l'immeuble où a grandi Romain Gary -né Roman Kacew- à Vilnius justement, immeuble reconnaissable grâce à une plaque qui y a été apposée. La vision de la cour et les pages de « La promesse de l'aube » qui remontent à la mémoire de Désérable font surgir alors l'image de l'un des personnages de l'enfance de Gary, précisément notre M. Piekielny. Ni une ni deux, Désérable décide d'en faire à nouveau un sujet de roman mais pour cela il lui faut s'appuyer sur du réel, d'où consultation d'archives de toutes sortes, conversations avec des Lituaniens au cours de ses nombreux allers et retours entre Paris et Vilnius et mises à contribution également du hasard et de son imagination débordante, quand il n'a malheureusement pas de réponse à ses multiples questions.
Tenace, Désérable ne lâche pas l'affaire qui s'avérera compliquée au vu du peu de traces restant de la communauté juive lituanienne ; il les cherchera et comblera les vides ; même si certains « morceaux de vie » sont inventés de toutes pièces, l'auteur nous convainc car le style est charmeur.
Désérable, prenant la figure de Romain Gary comme point de départ, rend aussi un hommage à la mémoire de la foule d'anonymes que celui-ci a côtoyés à Vilnius avant leur massacre

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Souvenirs de la marée basse

de Chantal Thomas

par Laurence G. - Au moulin des Lettres

D’une écriture élégante, dans de courts chapitres écrits au présent, Chantal Thomas nous fait revivre son enfance et sa jeunesse. Elle commence un peu plus tôt dans le temps avec la rencontre de ses parents à Lyon, le départ de ses grands-parents pour la cité balnéaire d’Arcachon suivi bientôt par celui de sa mère; son père, bien obligé, les rejoindra. Ce père d’ailleurs occupe bien peu de place dans la vie de la narratrice; devenu mutique quand il prend conscience qu’il lui faudra épouser une femme qu’il considérait comme une simple passade, il assume cette paternité non désirée mais il restera absent de la vie familiale. La mère, ne vivant que pour et par la natation, devient dépressive après son mariage quand elle comprend que sa vie de femme mariée l’enferme entre les quatre murs de la cuisine. La nage va la sauver du naufrage sentimental.
Qui reste-t-il dans le panthéon de Chantal ? Le grand-père, fabuleux raconteur d’histoires et inventeur de mondes merveilleux, et « les enfants venus d’ailleurs », les vacanciers, à l’origine d’amitiés éphémères sans cesse recommencées…
On se délecte de cette lecture, de ces tableautins sensibles qui disent les petits riens de l’enfance, les jeux infinis de l’imagination, la liberté totale de mouvement d’une enfant grandissant sur la plage et dans l’eau.
L’énergie pleine de curiosité de cette fillette pour le monde qui l’entoure nous enchante et la présence de cette mère étrange nous intrigue; leur histoire à toutes deux est « bancale » comme l’avoue l’auteure mais on la suit pas à pas jusqu’au bout, ensorcelés.

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