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30 septembre 2023

ELOÏSE

Gabriela Wiener, dont c'est le premier livre traduit en France, est une écrivaine, journaliste et essayiste péruvienne, déjà bien connue en Espagne, où elle réside depuis une dizaine d'années.
À la fois descendante d'un Européen, Charles Wiener, et d'Améridiens (cholos, comme on dit avec mépris au Pérou), Gabriela Wiener a grandi entre deux identités : celle de l'aïeul blanc au savoir prestigieux très valorisé au sein de sa famille (même si ce savoir masque des choses plus troubles) ; de l'autre celle de la famille maternelle, issue de la petite classe moyenne indienne, ayant intégré les normes racistes de la société péruvienne.
Comment s'aimer quand, petite fille, on a subi le regard dégradant des autres ? Quand la grand-mère maternelle s'adresse à son gendre avec « un respect excessif et immérité » (il est blanc) ? Quand l'aïeul Charles a pillé ou « récupéré » des artefacts précolombiens offerts aux musées les plus prestigieux ? Quand son propre père mène une double vie, à peine dissimulée ?
La narratrice ne cache rien de ses sentiments mêlés, de ses doutes, de sa rage face à la violence dont elle hérite au sein de son propre corps. Fragile et puissante à la fois, elle tente de s'extraire d'un passé colonial douloureux, et d'une lignée paternelle qui a fait la part (trop) belle à l'Européen venu et reparti sans savoir qu'il avait fait souche au Pérou. Se reconnaissant dans les masques huacos exposés dans les vitrines des musées, ou s'identifiant à l'enfant indigène exposé dans les zoos humains, Gabriela Wiener nous rappelle avec force ce que fut la conquête des Amériques et le chemin qu'il reste à faire pour décoloniser les esprits.



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