Le troisième volume de l'édition typographique intégrale des Cahiers 1894-1914, réalisé comme les précédents d'après les manuscrits originaux, révèle l'intéressante évolution de l'écriture valéryenne entre 1898 et 1900. Parallèlement au registre «Tabulae meae Tentationum», publié dans le tome II, Valéry poursuit un moment la rédaction du Système, cette méthode rigoureuse construite selon les besoins de son Moi, travaillant surtout ici à une étude de l'imagination qu'il nomme «Géométrie des images». Mais bientôt une autre voie se dessine et s'affirme dans deux importants cahiers inédits de 1900 : celle d'une prose abstraite littéraire, souvent d'allure aphoristique, instituant le fragment comme mode d'expression privilégié d'une pensée impatiente et toujours en acte. À travers l'écriture brève et la forme sous-jacente du recueil, on voit à l'œuvre un esprit ouvert à tout ce que la connaissance de son époque pouvait lui apporter de démarches intellectuelles spécifiques. Valéry parle de métaphores en termes de logique, de libre association en termes de mathématiques, met en rapport les sensations et la physique, la théorie et le monde réel. On découvre à la fois l'élan d'une curiosité scientifique et logique, avide d'analogies éclairantes, et ce sens aigu de la modernité, cette sensibilité aux courants à venir de l'histoire intellectuelle qui font la force des Cahiers. Comme dans les volumes précédents, quelques pages typiques du manuscrit original sont reproduites en fac-similé. On trouvera en outre un étonnant inédit de jeunesse, l'Essai sur le Mortel, ainsi qu'un index analytique couvrant les trois premiers tomes.
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